Pour afficher leur intransigeance à propos des récentes mesures répressives contre les activités illégales perpétrées à bord de bateaux de pêche dans leurs eaux territoriales, les autorités tanzaniennes ont infligé plus de 6 millions d’euros d’amendes à une flotte de 19 bateaux immatriculés à l’étranger, qui ont fui la Tanzanie sans se soumettre aux inspections requises.

Quelques semaines après qu’une patrouille menée par des agents des forces de l’ordre tanzaniens accompagnés de membres de Fish-I Africa postés secrètement à bord du navire M/Y Ocean Warrior de Sea Shepherd a permis l’arrestation de trois bateaux de pêche, le Ministère tanzanien de l’élevage et de la pêche a infligé des amendes d’un montant total de 19 milliards de shillings tanzaniens (6 865 160 EUR) à 19 autres bateaux de pêche.

Forces de l’ordre tanzaniens et des inspecteurs au port de Mtwara. Photo de Jax Oliver/Sea ShepherdForces de l’ordre tanzaniens et des inspecteurs au port de Mtwara. Photo de Jax Oliver/Sea Shepherd

Les 19 navires appartiennent à une flotte de 24 palangriers qui, bien que munis d’une licence de pêche en eaux tanzaniennes, ont fui ces eaux territoriales dès qu’ils ont eu vent des inspections menées à bord des bateaux.

Les premiers abordages et inspections ont révélé qu’au moins deux des 24 bateaux de pêche transportaient des ailerons de requins qui excédaient de loin les carcasses présentes à bord. D’après la loi tanzanienne, le nombre d’ailerons doit correspondre au nombre de corps de requins.

Un des bateaux, le F/V Tai Hong 1 sous pavillon chinois, a été arrêté pour possession d’ailerons de requins mais aussi pour avoir privé d’eau et de nourriture les pêcheurs tanzaniens employés à bord et qui étaient logés dans une petite pièce non ventilée munie de seulement deux lits pour douze hommes.

Après l’arrestation du F/V Tai Hong 1, les données de localisation obtenues à travers les systèmes de navigation des bateaux ont montré un exode massif de la flotte légale depuis les eaux tanzaniennes vers la haute mer, hors de la juridiction des patrouilles tanzaniennes.

La loi tanzanienne impose aux bateaux de pêche de communiquer leurs activités à l’un des quatre ports tanzaniens compétents pour une inspection post-pêche avant de quitter les eaux territoriales. Ces inspections doivent vérifier que les bateaux sont conformes aux termes de leur licence.

Sur les 24 bateaux de pêche en eau profonde autorisés à pêcher en Tanzanie, 19 ont évité les inspections en quittant les eaux de Tanzanie et ont maintenant été condamnés chacun à une amende d’un milliard de shillings tanzaniens par le Ministère de l’élevage et de la pêche. Un milliard de shillings tanzaniens valent environ 360 000 euros.

Les propriétaires du bateau de pêche ont 14 jours pour payer, sans quoi des poursuites judiciaires seront engagées.

“Il est hautement suspect que des navires munis des autorisations pour pêcher légalement évitent délibérément les inspecteurs tanzaniens et se cachent en haute mer. Après l’arrestation du F/V Tai Hong 1, on peut raisonnablement penser que les inspections auraient mis au jour d’autres cargaisons d’ailerons de requins. L’arrestation de trois bateaux de pêche pour crimes de pêche et la fuite de 19 autres navires devant les autorités, montrent l’importance des abordages et des inspections en mer de bateaux de pêche et souligne les premiers succès de l’Opération Jodari. Sea Shepherd félicite le gouvernement tanzanien d’avoir pris des mesures énergiques qui montrent que les bateaux de pêche qui tentent de fuir l’Ocean Warrior n’échapperont pas à la poigne de la justice tanzanienne”, a déclaré le capitaine Peter Hammarstedt, directeur des campagnes de Sea Shepherd Global.

L’Opération Jodari vise à contrôler toutes les activités des navires présents dans les eaux de Tanzanie, en abordant ceux qui sont suspectés de pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) et à former les agents tanzaniens au suivi, au contrôle et à la surveillances (MCS) de la pêche dans le pays, notamment à travers des procédures d’inspections et d’abordage.

A bord du navire Ocean Warrior de Sea Shepherd, les agents chargés de l’application de la loi, avec l’Autorité de pêche en eau profonde, la Marine tanzanienne, l’Agence de lutte contre les stupéfiants et l’équipe d’intervention inter-agences (MATT) collaborent avec le capitaine Adam Meyerson et l’équipage de Sea Shepherd pour patrouiller dans les eaux souveraines de Tanzanie. Les agents chargés de l’autorité judiciaire ont le pouvoir d’aborder, inspecter et arrêter les bateaux qui violent la loi du pays. La MATT est dirigée par la force de police tanzanienne et comprend les services forestiers de Tanzanie, la division de la faune, la division des pêches et le service de renseignement et de sécurité de la Tanzanie. Il a été créé pour cibler les individus et les réseaux qui contrôlent la criminalité environnementale dans la région et le commerce illégal d’espèces sauvages.

L’Opération Jodari est soutenue par Fish-I Africa, un partenariat de huit pays d’Afrique de l’est (les Comores, le Kenya, Madagascar, Île Maurice, le Mozambique, les Seychelles et la Somalie) qui promeut le partage d’informations et la coopération régionale pour lutter contre la pêche illégale industrielle dans l’ouest de l’Océan Indien.

Selon les estimations, entre 11 et 26 millions de tonnes de poissons sont capturées chaque année au niveau mondial à travers la pêche INN. Les pays en développement sont particulièrement vulnérables à la pêche INN, qui fait perdre environ 1 milliard de dollars à la région occidentale de l’Océan Indien chaque année.

L’Opération Jodari est le quatrième partenariat entre Sea Shepherd et les Etats côtiers africains qui font montre de volonté politique pour mettre fin à la pêche INN, parmi lesquels le Gabon (Opération Albacore) et le Libéria (Opération Sola Stella).