Communiqué de presse / 10 décembre 2024.
Ce mercredi 4 décembre, le Marineland d’Antibes a annoncé la fermeture définitive de ses bassins à compter du 5 janvier prochain. Dans son communiqué, le parc promet de « relocaliser » ses animaux captifs, notamment les dauphins, dans ce qu’il qualifie des « meilleures structures ».
Après la décision salutaire de Madame Pannier-Runacher, alors ministre de la Transition écologique, de refuser le transfert des deux orques survivantes au Japon, Wikie et Keijo font aujourd’hui face au risque d’un transfert vers le Loro Parque aux Canaries. Ce parc est bien connu pour ses conditions de captivité déplorables. Cette solution, loin de respecter les engagements français en matière de bien-être animal, rappelle tristement les dérives que la loi de 2021 visait précisément à abolir.
Une loi ambitieuse, une mise en œuvre inexistante
Promulguée en 2021, la loi visant à lutter contre la maltraitance animale interdit, à compter du 1er décembre 2026, la détention et la reproduction en captivité des cétacés à des fins commerciales. Cette loi amorçait un changement de fond dans la nature du lien entre les animaux et les humains, vers davantage de respect et de considération.
Malheureusement, à trois ans presque jour pour jour de la ratification cette loi et à un mois de la fermeture du Marineland d’Antibes, aucune solution viable pour accueillir nos cétacés captifs, dauphins y compris, n’est prévue par l’État français.
Face à cette inertie, la fermeture imminente du Marineland soulève plusieurs questions cruciales, aujourd’hui toujours sans réponse : Où iront Wikie et Keijo à partir du 5 janvier prochain ? Que prévoit-on pour les dauphins du Marineland ? Comment la France peut-elle envisager de confier ces animaux à des structures à l’étranger, dont les conditions vont à l’encontre de l’esprit même de notre législation ?
Un sanctuaire en France, une nécessité pour plusieurs raisons
Il y a 8 mois, Sea Shepherd France proposait une alternative aussi ambitieuse que nécessaire : la création d’un sanctuaire marin en France. Ce projet, fruit d’une collaboration entre experts nationaux et internationaux, cétologues, bio-acousticiens, vétérinaires, biologistes marins, offrait une première réponse concrète aux besoins des cétacés.
Accueillir Wikie et Keijo en France n’est pas qu’un choix pragmatique, c’est un acte de responsabilité. Ces orques, exploitées pendant des années, méritent un espace où elles pourront vivre dans des conditions proches de leur environnement naturel, tout en limitant le stress lié au transport. Les longues distances augmentent les risques pour leur santé et leur bien-être, autant de raisons pour que ce sanctuaire soit établi sur nos côtes.
En restant sur le territoire français, ces orques pourraient bénéficier de la protection offerte par notre législation sur le bien-être animal, tout en incarnant un projet scientifique et éducatif unique au monde.
Un dossier qui pâtit de l’immobilisme et du climat politique instable
Pour concrétiser ce type de projet, il faut une volonté politique forte. Or, aujourd’hui, le climat politique est marqué par l’instabilité et le désengagement. Les gouvernements se succèdent, les ministres changent et les priorités s’érodent. À un mois de la fermeture du Marineland, aucune décision claire n’a été prise. Les discussions autour de la zone que nous avions arrêtée pour le sanctuaire ont été balayées par le ministère des Armées et le projet semble aujourd’hui voué à l’oubli.
Comment avancer lorsque l’État recule ? Comment assumer des engagements législatifs majeurs quand ceux qui les ont portés hésitent face aux défis qu’ils imposent ?
Le destin de ces orques dépasse leur simple survie. Leur sort reflète notre capacité, en tant que société, à tenir nos promesses et à affirmer nos valeurs. Ce n’est pas seulement le bien-être de deux cétacés qui est en jeu, mais notre dignité collective.
Nos décideurs, quels qu’ils soient, doivent prendre toute la mesure des enjeux découlant d’une telle décision. Notre responsabilité est de garder nos orques sur notre territoire pour leur offrir une vie respectueuse et digne. Il s’agit d’un choix de société.
Nous pouvons dès aujourd’hui choisir d’avancer sur le plan de la maltraitance animale en nous donnant les moyens de mettre en application notre législation qui vise, non pas à exporter la maltraitance qui découle de nos choix passés mais à y mettre un terme.
En se penchant sur un projet de sanctuaire marin français, la France aurait l’opportunité rare de devenir le premier pays au monde à statuer sur la création d’un sanctuaire marin pour accueillir des orques ayant vécu en captivité et ainsi ouvrir la voix à ses voisins avec cette initiative d’envergure mondiale. Au-delà du destin individuel de Wikie et Keijo, c’est aussi de notre propre dignité, de notre courage et de notre responsabilité en tant que grande nation maritime qu’il s’agit.
Crédits photos : Morgane Trussardi/Sea Shepherd France