Trois ours auront été tués par l’Homme dans les Pyrénées en 2020. Le premier sur le versant catalan espagnol en avril, le deuxième sur le versant français en Ariège à peine quelques semaines plus tard début juin, et le troisième le 29 novembre dans la province espagnole de Huesca.

Rappel des faits côté espagnol : En avril 2020, les équipes du Conseil Général du Val D’Aran retrouvent le jeune ours Cachou né en 2015, mort au fond d’un ravin de 40 mètres. L’enquête surprend alors dès le début par la demande inédite du juge qui réclame le secret de l’instruction, une première dans une enquête sur la mort d’un animal. Quelques semaines plus tard, la presse espagnole confirme l’empoisonnement de Cachou à l’éthylène glycol. Les journaux annoncent en parallèle l’interpellation d’un agent de l’environnement du Conseil Général d’Aran. Le fonctionnaire faisait partie de l’équipe de surveillance chargée de la sécurité des ours dans la région. L’enquête prend rapidement une autre tournure. D’autres suspects étant impliqués dans l’empoisonnement de l’ours, ces derniers sont mis sur écoute par la police locale qui découvre l’existence d’un trafic de drogue colombien. Douze personnes seront arrêtées, parmi lesquelles un garde forestier et le maire d’un village de la région.

L’enquête sur l’empoisonnement de Cachou se poursuit. En mars dernier, la Dépêche indiquait dans un article : « Selon nos confrères des médias espagnols, les deux principaux suspects dans l’empoisonnement de l’animal sont un agent environnemental du Conseil Général d’Aran, ainsi qu’un homme qui fut conseiller de territoire au gouvernement aranais entre 2015 et 2019. Un comble : le premier participait au programme de suivi de l’ours, tandis que le second avait en charge la gestion des fonds européens pour la repopulation de l’ours des Pyrénées ». (article disponible ici : Mort de l’ours Cachou en Espagne : l’enquête révèle un trafic de cocaïne – ladepeche.fr)

Rappel des faits côté français : un jeune ours est découvert abattu à Ustou en Ariège en juin dernier. Transporté à l’école vétérinaire de Toulouse, l’autopsie confirmera ce que nous savions déjà : le caractère criminel de sa mort. Il y a un an, face à la gravité d’un tel crime et connaissant très bien la complexité de ce type d’affaire pour lutter contre le braconnage depuis plus de 40 ans, nous avions lancé une récompense de 10 000€ pour toute personne permettant aux autorités d’arrêter le ou les responsables de la mort du jeune ours. Quelques jours plus tard, des dons spontanés de particuliers français et étrangers s’y associaient. Du jamais vu. La cagnotte passait de 15 000€ à 20 000€, 35 000€ puis 45 000€ pour atteindre aujourd’hui la somme de 50 000€. Cette pratique peu courante en France avait permis une forte médiatisation et une mobilisation de l’opinion publique.

Un an plus tard, la pression est bien là mais l’enquête n’est pas au stade d’avancement de celle de nos voisins de l’autre côté des Pyrénées. La faute à qui ?… Un manque de moyens pour les enquêteurs ? La peur de témoigner ? Quand Christine Téqui, présidente du conseil départemental de l’Ariège, également maire d’un petit village proche d’Ustou au moment des faits, appelle la montagne à rester muette, on ne peut qu’imaginer la pression qui pèse sur les épaules (et celles des proches) de ceux qui auraient des informations pouvant faire avancer l’enquête…

Nous avions immédiatement porté plainte contre Christine Téqui pour subornation de témoin, puis pour diffamation, cette dernière ayant qualifié Sea Shepherd de “pompe à fric“. En parallèle, une autre plainte avait été déposée contre l’ASPAP (Association pour la Sauvegarde du Patrimoine d’Ariège Pyrénées) qui avait accusé Sea Shepherd de lancer une “chasse à l’homme avec prime à la délation” et d’avoir recours à “des procédés dignes de la guerre 39-45“.

Si les plaintes pour diffamation à l’encontre de C. TEQUI et de l’ASPAP sont encore en cours d’instruction, la plainte pour subornation de témoin a quant à elle été classée sans suite. Sea Shepherd conteste cette décision et a établi un recours auprès du Procureur Général.

L’enquête est aujourd’hui protégée par le secret de l’instruction. Les enquêteurs de la gendarmerie nationale sont toujours mobilisés sous la direction du Procureur de la République. « Une enquête préliminaire dure en moyenne entre 1 et 3 ans en France et nous avons bon espoir que les enquêteurs finissent par identifier les auteurs de ces délits, qu’il s’agisse de l’auteur des coups de feu ou des personnes qui l’aident à échapper à la justice. Les gendarmes en charge de l’enquête semblent très motivés » Jean Tamalet du cabinet King & Spalding, avocat de Sea Shepherd France.

En novembre dernier, c’est l’ourse Sarousse qui est tuée par un chasseur de sanglier dans la province de Huesca, à nouveau en Espagne. La légitime défense est invoquée par ce dernier. Selon la presse locale, si les enquêteurs voient cette hypothèse comme la plus probable, ils envisagent deux autres scénarios : « une erreur d’appréciation du chasseur qui pensait tuer un sanglier ou une intention délibérée de tuer l’ourse ». (Ours des Pyrénées : le chasseur qui a tué Sarousse aurait tiré pour se protéger (francetvinfo.fr))

Ce sont encore des chasseurs qui sont responsables de la mort d’un quatrième ours l’année dernière dans le massif des Asturies cette fois (le même jour que la mort de Sarousse) lors d’une battue aux sangliers. Ces derniers ont déploré un accident. Une enquête a également été ouverte.

Nous rappelons que la récompense de 50 000€ est bien entendu et plus que jamais toujours d’actualité pour tout témoignage permettant de faire condamner le ou les braconniers qui ont tué le jeune ours retrouvé mort en Ariège le 9 juin 2020.