Nous sommes ce vendredi 15 novembre, devant la Cour d’appel de Pau pour défendre les mammifères marins du Golfe de Gascogne contre le projet d’interconnexion sous-marine porté par RTE et soutenu par la Surfrider Foundation !

Ce projet de 3, 1 milliards d’euros fait état de nombreuses défaillances : étude d’impact insatisfaisante, avis négatif du Conseil National pour le Protection de la Nature (CNPN), mesures de compensation très insuffisantes, omission de la présence de nombreuses espèces, violation du principe de précaution… (lire notre article complet sur le sujet ici )

Nous nous sommes fermement opposés à ce projet aux côtés de Landes Aquitaine Environnement (LAE) et Défense des Milieux Aquatiques (DMA). En août dernier nous vous annoncions que le juge nous donnait raison et ordonnait la suspension des travaux de bathymétrie le temps de mettre en place une zone d’exclusion afin de protéger les mammifères marins et de produire une nouvelle étude d’impact.

Parmi les points les plus préoccupants de cette première phase de travaux : l’utilisation de sonars pour réaliser les études préalables de bathymétrie, (c’est-à-dire de cartographie des fonds marins) indispensables à l’installation des câbles sous-marins.

Les cétacés sont très sensibles à cette pollution sonore. Ils peuvent être effrayés et remonter trop vite à la surface, ce qui provoque des accidents de décompression [pathologie survenant lors d’une diminution trop rapide de la pression environnante]. Cela entraîne des échouages, perturbe la communication, le nourrissage et la reproduction des mammifères marins.

L’usage de sonars est reconnu par la communauté scientifique internationale pour porter atteinte à l’état de conservation des mammifères marins. Raison pour laquelle les conventions internationales imposent la mise en place de pratiques strictes telles que l’augmentation progressive des sonars pour éviter les lésions des appareils auditifs des cétacés ou encore l’arrêt des machines lorsque les mammifères marins sont observés à proximité.

Ces pratiques pourtant classiques dans le domaine de la bioacoustique n’ont pas été mises en place par RTE malgré l’impact connus de l’usage des sonars. Une condamnation par le tribunal de Bayonne a été nécessaire pour que la société RTE daigne mettre en œuvre les mesures de précaution élémentaires pour assurer la préservation des mammifères marins !

interconnexion france espagne RTE

De plus, il aura fallu cette condamnation pour que RTE réalise enfin une étude d’impact pour cette première phase de travaux ! Or cette dernière doit par définition être réalisée obligatoirement AVANT TOUS TRAVAUX mais elle n’a été produite qu’à la fin et sous la contrainte de la justice. Comble de l’ironie, l’étude réalisée par le bureau d’étude COHABYS, financé par RTE, conclut de façon « étonnante » à l’absence d’impact significatif du projet sur les mammifères marins…

Fait encore plus surprenant, côté espagnol l’étude d’impact a justifié la mise en place de ces mesures élémentaires et classiques de protections pour les mammifères marins… Il faudrait donc croire selon les études du cabinet COHABYS financées par RTE que les impacts s’arrêtent à la frontière ?!

C’est pourtant bien ce qu’assume RTE avec cette nouvelle étude qui ne prend pas en compte le cumul de l’ensemble des sonars utilisés et qui fait un calcul inexact des décibels auxquels les mammifères marins seront exposés. L’étude présente également de fausses affirmations basées sur la prétendue innocuité des sonars civils, sous-estime les enjeux de la valeur écologique des mammifères marins présents dans le golfe de Gascogne et ne rend pas compte de l’état de conservation de tous les mammifères marins présents. Il n’est par exemple pas indiqué que les marsouins, les grands dauphins et les dauphins communs sont dans un état de conservation défavorable !

Parmi les preuves de perturbations engendrées par les travaux de bathymétrie, l’association APEX CETACEA spécialisée dans l’étude des cétacés du golfe de Gascogne a également rapporté les faits suivants : « Durant toute la période où les navires de travaux étaient actifs (…) aucune observation de grand cétacé tel que les rorquals ou d’autres baleines n’a été effectuée. Cette absence contraste avec les données des années antérieures qui montrent une présence régulière de ces espèces durant la saison de migration. Les perturbations sonores et les mouvements constants des navires dans l’aire d’étude provoquent l’évitement des zones d’activités par les grands cétacés qui dépendent de leur audition pour se nourrir, s’orienter et interagir socialement. Cela suggère un risque de désertification temporaire de leur habitat dans cette zone.

Une augmentation notable d’animaux esseulés et désorientés a également été observée dans la région, comparée aux années précédentes. Divers individus ont été repérés seuls sans leur groupe habituel pour cette période (…). Ce phénomène pourrait être lié aux perturbations acoustiques qui affectent les systèmes d’écholocation des cétacés provoquant des désorientations et des isolations sociales. »

Pourtant, malgré les nombreuses menaces qui alertent autour de ce projet, RTE a fait appel de la décision de justice qui permettait pourtant d’appliquer les règles de base du principe de précaution. Nous retournons donc devant la justice ce vendredi 15 novembre pour défendre les mammifères marins du golfe de Gascogne.

Concernant Surfrider qui soutient le projet de RTE et compte l’entreprise parmi ses partenaires stratégiques officiels, l’association adopte un positionnement incompréhensible à nos yeux. Il est très préoccupant que des ONGs qui prétendent veiller aux intérêts de l’océan apportent une caution environnementale à des projets aussi destructeurs. Éric Morbo, nouveau directeur de Surfrider a pourtant déclaré dans la dernière newsletter de l’association : « J’ai pris conscience de l’influence des lobbys industriels et du rôle de contre-pouvoir des associations et des collectifs citoyens, indispensable pour faire valoir l’intérêt général ».

Devons-nous en déduire que Surfrider entend se désolidariser de ce projet ? Ou allons-nous à nouveau recevoir un copier-coller des éléments de langage disponibles sur le site (qui ne nous ont guère convaincus) en les interpellant à nouveau ?