Nous le savons, en matière d’espèces protégées, il y a la loi – et quand la loi gêne – il y a les dérogations.
C’est cette excuse que le Gouvernement français s’apprête une nouvelle fois à utiliser pour éviter toute mesure contraignante et réellement efficace pour les chances de survie des dauphins dans le Golfe de Gascogne.
En moyenne, 10 000 dauphins sont tués chaque année par les engins de pêche non sélectifs dans la zone. Ce taux de mortalité est intenable pour la survie de cette population de prédateurs très vulnérables qui se reproduisent peu et très lentement et qui, du fait de leur biologie, ne peuvent pas compenser de telles captures. Outre la dimension éthique liée à des enjeux de bien-être animal, il y a là un véritable enjeu environnemental : celui du maintien d’une population de dauphins en bonne santé, garante d’un écosystème marin fonctionnel. Un « bon état de la population » pour lequel la France a des responsabilités réglementaires, qu’elle n’assume en aucune façon.
Après une condamnation pour carence vis-à-vis de la protection des mammifères marins en 2020, des poursuites engagées (mise en demeure et avis motivé) par la Commission européenne et une injonction prononcée par le Conseil d’État, le Gouvernement refuse d’appliquer les règles qui lui incombent.
La communauté scientifique, appuyée par la plus haute juridiction nationale – le Conseil d’État – demandent la mise en place de fermetures spatio-temporelles des zones de pêche, ce que le Gouvernement refuse de mettre en place depuis plus de 3 ans.
Dans sa décision du 20 mars 2023, le Conseil d’État demande d’assortir « les mesures engagées ou envisagées en matière d’équipement des navires en dispositifs de dissuasion acoustique […] de mesures de fermeture spatiales et temporelles de la pêche appropriées ».
L’arrêté du Gouvernement ne prévoit aucune fermeture spatio-temporelle, puisque les bateaux équipés de pingers ou de cameras de remote e-monitoring pourront continuer de pêcher. Les dérogations prévues visent à détourner la mesure mise en place. Cela témoigne du refus de l’État d’appliquer les injonctions qui lui sont imposées par son propre juge.
Nous savons d’avance ce que cela augure : un énième hiver sanglant pour des milliers de dauphins.
Sea Shepherd France et d’autres ONGs étudient d’ores et déjà les recours possibles pour que les mesures efficaces soit enfin prises.