Communiqué de presse / 19 décembre 2023.


C’est un épineux dossier qui cristallise notre rapport à l’Océan. Le littoral de La Réunion qui devrait être une zone de remarquable biodiversité où les requins ont leur place légitime est devenu une piscine à vagues géantes dédiée à la glisse.

Et bien sûr, les requins qui s’y aventurent le font à leurs risques et périls. D’intenses campagnes de pêche « préventive » sont financées par l’État depuis de nombreuses années, jusqu’au cœur de l’aire marine protégée, parfois en toute illégalité.   

Sea Shepherd France a de nouveau saisi le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion le 8 décembre dernier sur l’urgence à suspendre toute destruction administrative de ces animaux emblématiques. 

Depuis le 27 septembre 2012, Sea Shepherd France, Longitude 181 et plus récemment Le Taille Vent et VAGUES, attaquent les arrêtés préfectoraux de prélèvements ciblés de requins tigres et bouledogues dans la réserve nationale marine de La Réunion, en vue de lutter contre les morsures parfois mortelles que peuvent infliger ces animaux aux usagers de la mer et principalement aux surfeurs. 

Ce sont ainsi 6 procédures qui ont été engagées de 2012 à 2022 et qui ont permis de faire suspendre et/ou annuler systématiquement ces arrêtés de destructions au sein du cœur de la réserve. 

Cependant les mises à mort se poursuivent en dehors de la réserve et dans les zones non sanctuarisées de cette même réserve qui sont ouvertes à la pêche professionnelle. 

 

Massacre Requins La Réunion

Parallèlement les océans continuent à se vider des requins à un rythme alarmant (ils disparaissent au taux de 7 % par an). 

L’UICN a condamné cette gestion du risque requins par le « vide » : 

– alors que les requins tigres et bouledogues, sont des espèces menacées, au sens de l’UICN

– que le requin bouledogue a rejoint les annexes de la CITES en février 2023 et est depuis cette date une espèce « protégée ».

– et que les dispositifs de pêche déployés pour leur capture, les palangres, sont des engins non sélectifs qui capturent plus d’espèces non ciblées (dont certaines protégées et/ou en danger critique d’extinction) que de requins recherchés.

Face à ces constats, Sea Shepherd France et les autres associations ont demandé au préfet de La Réunion l’arrêt de ces mises à mort perpétrées par le groupement Centre Sécurité Requins, sans qu’aucun arrêté de police n’ait été adopté par le préfet et en l’absence de toute donnée scientifique relative à l’état de la population des espèces ciblées et de celles accessoirement prélevées.

Le préfet ayant répondu qu’il ne pouvait pas faire autrement, cette décision a été attaquée devant le tribunal administratif en janvier 2023.

10 mois après le préfet ne nous a toujours pas répondu.

Pendant ce temps, les éléments scientifiques continuent à s’accumuler contre cette politique létale de gestion du risque :

– Étude scientifique sur l’effet réserve de mai 2023, publiée en septembre 2023, actant de la perte de biodiversité corallienne et d’une tendance nette à la baisse de la biomasse totale des poissons, dans la réserve et ses régions limitrophes (rôle essentiel écosystémique des requins),

– Thèse universitaire et publications alertant sur le très mauvais état des populations de requins bouledogue à La Réunion (2023), et des populations de requins tigre (2022), 

– En octobre 2023, le groupe de spécialistes des requins de l’UICN s’est prononcé en faveur d’approches non létales pour gérer les risques d’interactions requins / humains.

Point d’orgue de cette urgence à intervenir, les captures d’espèces non ciblées se poursuivent du fait de la non-sélectivité des palangres avec en septembre et octobre 2023, 2 nouveaux requins non ciblés tués : un requin marteau halicorne, dont l’espèce est classée en danger critique d’extinction par l’UICN, et un requin pointe blanche de récif, dont l’espèce est protégée par des arrêtés préfectoraux.

Nous avons donc saisi en urgence le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion d’une demande de suspension de ces prélèvements illégaux.

L’audience s’est tenue le 8 décembre 2023.

Le délibéré est attendu avant la fin de l‘année.