Dimanche 20 août vers 8h00 du matin, un bébé phoque se dépose sur la plage de Fort-Bloqué, à Ploemeur (Bretagne). En pleine période estivale, la plage est bondée de monde.

La Mairie prend alors ses instructions auprès de l’Observatoire Pélagis, référent du Réseau National Echouage qui donne pour consigne stricte de ne pas intervenir et de se contenter de placer un périmètre autour du petit pour empêcher quiconque de s’approcher.

Nous communiquons régulièrement sur nos réseaux et nous l’avons fait encore récemment sur la nécessité de ne pas approcher de trop près les phoques, notamment les bébés afin de ne pas provoquer un abandon par leur mère. Cependant, avant de décider de ne pas intervenir sur un bébé laissé seul, il convient d’observer son comportement et son état physique général mais aussi de prendre en compte le contexte de l’échouage (ici une plage pleine de monde, par jour de forte chaleur) pour s’assurer qu’il ne nécessite pas une assistance.

Sans aucun diagnostic sur le bébé phoque dont l’état de santé n’a donc pas été évalué, Pélagis a ordonné d’attendre la prochaine marée haute. Au bout de nombreuses heures laissé seul, en plein soleil, sous le regard impuissant de nombreuses personnes présentes, le petit finit par mourir.

On aurait dû faire mieux pour ce bébé.

bébé phoque

Le plus frustrant de cette affaire est que Enrique Petit, notre capacitaire, soigneur animalier, habilité à soigner les phoques se trouve sur le secteur et est bien connu de Pelagis pour avoir été membre du RNE pendant de nombreuses années, avant d’en être exclu pour avoir refusé de laisser mourir des animaux pour lesquels Pélagis n’avait jugé utile d’établir un diagnostic.

Il est arrivé sur la plage de Ploemeur vers 17h00, seulement pour constater le décès de l’animal :

J’aurais pu être sur place en une vingtaine de minutes après le signalement du phoque si Pélagis m’avait prévenu. J’aurais pu estimer si le bébé nécessitait une prise en charge et surtout, j’aurais pu donner des instructions pour mieux le protéger du soleil. Je suis référent pour Pélagis depuis des années, ça s’est toujours très bien passé. Jusqu’au jour où, en 2022, j’ai commencé à intervenir avec Sea Shepherd France sur des cas qui nécessitaient une assistance et pour lesquels Pélagis ne voulait rien faire. Après m’avoir posé un ultimatum, arrêter d’intervenir avec Sea Shepherd ou être exclu du RNE, ils ont fini par me radier. On aurait dû faire mieux pour ce petit, je suis extrêmement amer

Enrique Petit

Capacitaire, soigneur animalier

Sauvetage des mammifères marins en détresse : l’abus de pouvoir de Pélagis

Nous saluons et reconnaissons volontiers le rôle important de Pélagis sur les échouages de mammifères marins morts, notamment dans le cas des captures de dauphins par les engins de pêche. En revanche, sur les échouages d’animaux marins vivants, leur autorité exclusive pose un problème fondamental d’efficacité et ne se justifie en aucune manière, notamment parce que comme dans le cas présent, ils donnent souvent des consignes qui ne reposent sur aucun élément scientifique ni diagnostic vétérinaire. Habitués à gérer des cadavres, leur monopole sur le Vivant pose de sérieuses questions.

L’attitude de Pélagis, sur les enjeux liés aux mammifères marins, confine littéralement à l’abus de pouvoir comme l’illustre leur attitude vis-à-vis d’Enrique Petit, à qui ils reprochent d’être intervenu à nos côtés, sans leur aval. Les deux cas qui ont valu à Monsieur Petit d’être exclu du RNE sont celui de Kalon, le rorqual qui s’était échoué vivant sur une plage du Finistère en septembre 2022 et celui d’un jeune phoque qui s’était retrouvé sur plage d’Étretat en janvier 2023.

Dans le cas du rorqual, Pélagis avait donné ordre de ne pas retenter de renflouage (à la suite de leur échec sur une première tentative à laquelle ils nous avaient empêchés de participer) et d’attendre que la baleine meure sur la plage étouffée sous son propre poids, en plein soleil, ce qui aurait pu prendre des jours.

Nous avons refusé une mort aussi atroce pour cette baleine et nous avons, avec l’aval du Ministère de la Mer, procédé à son renflouage.

Dans le deuxième cas, Pélagis avait jugé sur simple photo (sachant que le télé-diagnostic est interdit) que le phoque retrouvé sur une plage d’Étretat était un vieux phoque en fin de vie et qu’il fallait « laisser faire la Nature». Monsieur Petit avait alors roulé pendant cinq heures, pour aider les habitants qui passaient la nuit seuls au chevet du phoque. A son arrivée, il avait installé un périmètre de sécurité, et avait tenté d’établir un diagnostic et des soins d’urgence pour ce phoque (qui était en réalité dans la force de l’âge) et tenter une réhydratation en urgence, ce que Pélagis avait empêché en menaçant la vétérinaire appelée par Monsieur Petit de poursuites. Nous avons publié un rapport sur ce cas, comme sur celui de Kalon. Non seulement Pélagis a failli dans ces deux cas mais ils ont également sanctionné Monsieur Petit, pour avoir voulu faire mieux pour ces animaux.

bébé phoque

La nécessaire réforme du système d’intervention sur les mammifères marins en détresse en France

Nous alertons depuis près d’un an sur la nécessité de revoir les protocoles d’intervention sur les mammifères marins en détresse. Le monopole que Pélagis exerce en France sur ce sujet n’a aucun sens, aucune légitimité et n’est pas dans l’intérêt des animaux. Il est vital d’élargir le cercle des personnes mandatées pour intervenir auprès des préfectures, de mettre en place des formations de secours (formation inexistante en France actuellement comme nous avons pu le constater) pour les pompiers, police municipale, SNSM, et même pour les particuliers qui sont parfois amenés à intervenir en urgence, faute de présence de secours.

Plusieurs cas récents montrent des personnes de bonne volonté mais non formées à ces sauvetages, qui font parfois des erreurs de manipulation lourdes de conséquence pour la survie des animaux renfloués.

 

Lire nos rapports sur : 

👉 Le rorqual Kalon ici 

👉 Le phoque d’Etretat ici